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J'ouvre les fenêtres de mon âme. Je suis toujours dans cette même position. Instinctivement, je tâte l'arrière de mon crâne grâce à mes doigts fins et manucurés de rouge. Je repère une petite bosse qui s'est formée. Je grimace, encore toute engourdie. Ce coup a dû être brutal...
— Mademoiselle Fringer !
Je sursaute et pousse un cri de stupeur à la fois. Par la suite, je constate le vêtement bleu foncé et le blason en or sur sa poitrine qui m'interpelle. Ce n'est pas le dragueur immonde de tout à l'heure, c'est sûrement le policier avec qui j'ai parlé.
— Officier Walters, nous nous sommes eus au téléphone tout à l'heure, expose-t-il en me regardant droit dans les yeux, ils sont partis, vous n'avez rien à craindre.
— Ils... ils sont allés où ?
Je ressens de l'effroi en repensant à leur entrée et le bazar qu'ils ont causé. C'était un des moments les plus bizarroïdes et angoissants de ma vie.
— On les a arrêtés, ils sont tous au poste de police... vous vous sentez bien ? Désirez-vous aller à l'hôpital ?
— Non enfin oui je... je vais bien merci, pas besoin d'y aller. Vous savez pourquoi ils ont fait tout ça ?
— Ce sont des délinquants qui font partit d'un réseau pas très net. Ils cherchaient sûrement quelque chose mais on les a attrapés à temps. L'effet de la drogue sur eux les a ralentis, et nous a permis de les avoir.
Voilà pourquoi ils avaient ce tatouage, ils sont issus d'une même organisation douteuse.
— D'accord, merci officier Walters.
Encore sous le choc, le policier me fait une légère conversation sur ce qui vient de se passer, avant de s'en aller. Cependant, même si tout s'est plus ou moins remis en ordre, je ne me suis toujours pas remise de mes émotions. Je tente de me relever en m'appuyant sur le même comptoir qui m'a aidé à me cacher. Dans cet effort, je sens mon col être saisi par des grandes mains blafardes. Mon regard vert se retrouve alors plongé dans les yeux bleu clair de ma patronne. Oh merde...
— Toi ! crache-t-elle.
— Oh mon Dieu, Jocelyne ! Je... je dois t'expliquer que-
Je n'aime pas qu'on me crie dessus.
— Je le savais que je n'aurais jamais dû te faire confiance ! Tu as ruiné un lieu familial en seulement quelques heures de mon absence !
Je n'aime encore moins le bruit.
— Non, arrête Jocelyne, tu me connais... ils sont arrivés comme ça et je-
— Balivernes ! m'interrompt-elle. Tu es une employée pitoyable ! Je ne veux plus te voir venir demain ni après-demain ni les autres jours qui suivront ! Tu sais pourquoi ? PARCE QUE TU ES VIRÉE ! s'emporte la quinquagénaire en tapant son poing sur le comptoir marron.
Je ne veux pas pleurer. Non, Je ne veux surtout pas pleurer pour ça. Allez, Jaliah, ressaisis-toi. Je souffle profondément et la regarde une dernière fois avec dédain.
— Tu finiras par comprendre que ce n'était pas de ma faute, mais peu importe, je trouverais bien mieux.
— C'est cela ! Tes gaffes ont assez détruit notre lieu de travail !
Je prends toutes mes affaires dans le vestiaire avant de me diriger vers la sortie.
— Tiens ça, ajouté-je en mettant les clés sur une table à moitié cassée.
Je sors du Jocelyne & Coffee avec une démarche assurée. Au diable ce maudit endroit ! Au diable Jocelyne White ! Or, plus j'avance, plus je me rends compte que ça ne sert strictement à rien de s'inventer une confiance en soi quand on est aussi fragile.
— Ce n'est pas toi, tu n'es pas comme ça.
Je fixe mes mains marquées par mes traces d'ongles de tout à l'heure.
Je laisse le naturel prendre le dessus sur ce que j'appelle « ma personnalité ». Je relâche mes larmes qui se sont assez retenues devant Jocelyne. Maintenant, le rideau est tombé, le spectacle de gamins est terminé.
Dans les coulisses, je pleure, je déchire mes costumes de courage, je détruis mon image de femme forte, car je n'en suis pas une mais j'essaie... et pour l'instant, je n'y suis pas encore.
« Je pense être infaillible mais je ne fais que subir » — Jaelly LaRose. Je rentre dans mon quarante-cinq mètre carré, dépitée. Je balance mes affaires au sol, et me jette sur le canapé pour me réchauffer sous mon plaid. Charlotte, ma colocataire mais aussi ma meilleure amie, me remarque.
— Ce... ce n'est pas un souci, merci pour ton aide ça m'a juste surprise... il n'y a pas beaucoup de personnes comme toi, c'est drôle.— Malheureusement, oui... Sullivan.— Oh euh, enchantée, moi c'est Jaliah... Jaliah Fringer.Il continue de me fixer sans rien dire, il semble déconcerté mais fasciné à la fois. Mais qu'est-ce qu'il a à la fin ? Non pas que ça me déplaise, mais ça me déstabilise énormément.— J'ai quelque chose sur le visage ?
« Jusqu'aujourd'hui je me sers des pierres qu'on me lance pour essayer de construire quelque chose » — Jaelly LaRose.— Merde ! Je vais être en retard pour-Argh, quelle conne. Je me rends vite compte que je dis des sottises, me rappelant de l'ignoble Jocelyne. Mon estomac se tord en y repensant, donc je m'enroule dans la couette douce et moelleuse. Une odeur maintenant familière, se dégage du tissu.
Je le regarde de haut en bas. Je dois admettre qu'il est encore plus beau que le soir où nous nous sommes rencontrés. Ses yeux sombres me font encore de l'effet, et sa carrure athlétique ne me laissera jamais indifférente. En fait, c'est une vraie attraction que j'éprouve... je ressens en particulier de l'excitation pour lui, pas de l'amour ou quelque chose comme ça.Il est sexy, il a tout pour me plaire, et ça, je ne pourrais pas lui enlever. Cependant, nous nous ne pouvons pas tomber amoureux d'une personne même si elle est séduisante. Je pourrais passer la journée à l'hôtel, mais jamais je ne serai capable de faire ma vie avec lui. C'est comme ça.— Merci, c'est adorable de ta part.
« J'aurai voulu te dire combien tu m'attirais : ton regard enflammant mes sens, me rendant encore plus vulnérable que je ne le suis déjà » — Jaelly LaRose.Sérieusement ? Ça m'agace profondément ! Je hais être prise pour une vulgaire conne ! Même si je n'ose pas toujours le dire à haute voix,
— Je vais commencer par me présenter.— Allez-y, quel... est votre nom ? demande-t-il en sortant une feuille et un stylo, mettant de côté son MacBook de dernière génération.— Je m'appelle Jaliah Fringer.Ces quatre mots semblent résonner fortement dans la pièce. Ai-je parlé trop fort ? Merde, j'en fais des caisses aux premières phrases, génial. Le patron de la boîte garde ses yeux rivés sur la page vierge, totalement tétanisé. Puis il se redresse et pose son regard sur moi. Vraiment bizarre lui... la beauté n'inclut pas toujours l
« Grains de sable dorés, poussière d'étoiles féériques, entre avec moi dans une histoire enchantée » — Jaelly LaRose— C'est pour ça que je t'ai repoussée... il hait, il interdit les rapprochements et tout ce qui est "couple" dans la boîte.
Il démarre au quart de tour, me laissant sur le pas de la porte.J'hausse les épaules et sort mes clés pour les insérer à l'intérieur de la serrure, sauf que la porte s'ouvre toute seule. Je fronce les sourcils, inquiète. Je rentre avec prudence dans la maison. Un courant d'air glacial vient caresser mes bras. Il y a un silence monstre qui me procure des sensations désagréables !Je retire mes talons dans le hall, et avance pieds nus afin de diminuer le bruit. Je regarde sur ma droite et mon cœur semble me lâcher : je retrouve Charlotte, étalée sur le sol au milieu des meubles en débris. Tous ces biens que nous avions si durement payés sont en ruines, mais ce n'est pas ç